29 Décembre 2020
Alors que la pêche a occupé une grande partie des négociations pour trouver un accord de sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne, bizarrement, la finance a été ignorée. Le projet des financiers anglo-saxon d'avoir un super paradis fiscal aux portes de l'Union européenne demeure !
Dès l'accord signé, Boris Johnson a même annoncé dans un quotidien anglais son intention de multiplier les ports francs, à taxation ultra-légère pour concurrencer les ports européens !
Il faut dire que depuis plusieurs années la City et plusieurs capitales européennes se livrent une concurrence sans merci pour attirer les capitaux en proposant les meilleurs schémas d'optimisation fiscale.
A ce jeu, la City était déjà très bien placée: elle est la première place financière mondiale sur le marché des capitaux. 7000 milliards de dollars y sont échangés chaque jour ! Et la place londonienne réalise 60% de toutes les opérations liées aux marchés européens des capitaux.
Mais c'est surtout un paradis fiscal bien connu des fonds d'investissements et de toutes les grandes multinationales qui y délocalisent leurs bénéfices, afin d'éviter de payer les impôts là où ils sont installés.
La City sert en effet de passerelle pour transférer ces bénéfices dans les îles britanniques telles que les Caïmans ou encore Jersey, située à quelques encablures des côtes françaises. Ces juridictions britanniques sont des paradis fiscaux notoirement connus. Les Îles Britanniques accueillent 6000 milliards d'actifs en leur proposant un taux d'imposition moyen sur les bénéfices à 1,73%.
Avec ou sans accord, le Brexit a ouvert une guerre entre paradis fiscaux, entre la City et les pays de l'Union à taux d'imposition quasi nul tel que le Luxembourg, l'Irlande ou les Pays Bas.
Et plus rien ni personne n'empêchera maintenant la City d'adopter ses propres règles fiscales, même si les milieux financiers doivent pour cela ouvrir une succursale au sein de l'Union européenne .
Dans cette guerre, les grands perdants seront les peuples : la fraude et l'optimisation fiscales coûtent 80 à 100 milliards d'euros au budget de la France, tous les ans et près de 1000 milliards d'euros aux pays de l'Union européenne. A l'heure de la lutte contre la pandémie, cette guerre au « moins disant fiscale » est indécente, scandaleuse. Elle devrait susciter l'indignation générale.
Sur les 1500 pages de l'accord de Brexit, il aurait pu y avoir quelques propositions pour attraper des gros poissons de la finance qui privent les pays de l'Union européenne de plusieurs centaines de milliards d'euros d'impôts par an.
Il est urgent d'établir des règles fiscales identiques dans tous les pays de l'Union européenne et de mettre des filets de sécurité à la circulation des bénéfices réalisés dans nos pays. L'imposition à la source des bénéfices de ces multinationales reste à ce jour la meilleure solution, comme nous l'avons formulée dans une Proposition de loi déposée en 2019. Une occasion de régler ces pratiques malhonnêtes vient d'être manquée dans les négociations autour du Brexit. L'exigence des peuples pour une vraie justice fiscale en Europe n'a pourtant jamais été aussi forte.
L'argent existe et il coule même à flots pour une minorité qui fait tout pour échapper aux impôts. Ayons le courage de s'attaquer à ce fléau. C'est comme cela que nous pourrons répondre aux besoins humains, financer nos services publics et relever le défi écologique.
Fabien Roussel, secrétaire national du PCF et député du Nord,