Sur sa table, plusieurs dossiers, en cette rentrée chargée. Lourds, très lourds : entre autres, la loi Pacte, le futur budget de l’État. Le député de la première circonscription, membre du groupe GDR (Gauche démocrate et républicaine), Jean-Paul Dufrègne, évoque son travail, au Parlement, et dans sa circonscription.
Quels sont les plus gros dossiers sur lesquels vous planchez actuellement au Parlement ?
D’abord, il y a la loi Pacte [Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises] que nous examinons actuellement au Parlement. Ce projet apporte beaucoup de questions de fond, comme la privatisation d’entreprises emblématiques de la France, comme la Française des jeux, les Aéroports de Paris. Ou encore, la suppression du caractère obligatoire du stage à la création d’entreprise. Au sein de mon groupe, on s’est opposé à cette suppression, ce stage nous paraît indispensable pour débuter un réseau, découvrir les aspects comptables et réglementaires. Sur les 2.000 amendements déposés, une centaine l’ont été par mon groupe. C’est un vrai marathon, alors on se relaie avec les députés de mon groupe pour pouvoir continuer à être présents sur nos territoires.
Et il y a bien sûr le budget 2019, pour vous qui êtes membre de la commission des finances...
La présentation nous a été faite lundi 24 septembre. Nous avons disposé d’un délai de deux semaines pour déposer des amendements. Je ferai une intervention pour demander une motion de renvoi en commission, lundi 15 octobre. Le travail sur le prochain budget sera très lourd jusqu’au 20 décembre, avec beaucoup d’auditions, un emploi du temps serré. Le projet de loi de finances aborde tous les sujets, comme celui de la Sécurité sociale. Nous travaillons aussi avec les commissions des affaires étrangères, économiques…
« Ce budget nous inquiète. Le budget de l’agriculture devrait passer de 3,18 milliards à 2,88 milliards. Celui de la Cohésion sociale, de 17,22 milliards à 15,65 milliards. Ce sont des signes négatifs »
JEAN-PAUL DUFRÈGNE (Député membre du groupe GDR)
Quel est votre état d’esprit vis-à-vis de ce budget ? Ce budget nous inquiète. Le budget de l’agriculture devrait passer de 3,18 milliards à 2,88 milliards. Celui de la Cohésion sociale, de 17,22 milliards à 15,65 milliards. Ce sont des signes négatifs. Il y a une petite hausse des budgets de l’intérieur, de la défense, de la justice, mais c’est loin de compenser ces coupes sombres. Nous sommes toujours dans un dogme de baisse des dépenses publiques. On ne va revaloriser que de 0,3 % les pensions de retraite, les aides aux familles, on gèle les indices de la fonction publique et dans le même temps, ceux qui payent l’ISF reçoivent des cadeaux assez somptueux. C’est un budget d’injustices.
Ce travail, très accaparant, et qui vous retient à Paris jusqu’à quatre jours par semaine, vous passionne-t-il ?
J’ai longtemps été un élu local. Bien sûr, je n’étais pas vierge des méandres de la vie parlementaire, mais j’en méconnaissais certains aspects. Ce travail est passionnant. Ce qui est assez frustrant, c’est de ne pas pouvoir choisir de s’investir dans un sujet particulier. De plus, certaines réunions se télescopent. Ça va très vite, sans doute trop vite. On se retrouve avec des projets de loi qu’on n’a pas toujours le temps d’étudier, malgré le travail de synthèse réalisé par les collaborateurs du groupe.
Vous avez réagi sur les réseaux sociaux à la démission de Nicolas Hulot. L’environnement est une de vos préoccupations ?
Oui. Je pense qu’il y a des contradictions un peu fortes entre les décisions qui sont prises et les enjeux. La fiscalité punitive ne peut pas être une réponse à moyen et long terme. Le prix du carburant ne peut pas être pensé que par ce prisme, sinon on va supprimer une partie du pays. Dans mon village, à Saint-Menoux, un nouveau quartier a été aménagé. Il reste quelques lots à vendre. Depuis 18 mois, pas un seul n’a été vendu. Car un couple, aujourd’hui, fait ses comptes. On dit prime au transport, au vélo électrique, mais on n’imagine pas venir à Moulins à vélo ! C’est encore un raisonnement d’urbains. Ces questions vont impacter très rapidement les villages.
« Aujourd’hui la pensée est urbaine et cela imprègne les décisions »
JEAN-PAUL DUFRÈGNE (Député membre du groupe GDR)
Vous vous êtes fait le porte-voix de la ruralité, au sein de l’Association sociale des nouvelles ruralités, aujourd’hui présidée par le nivernais Patrice Joly. Maintenant que vous siégez à l’Assemblée, cela vous donne-t-il plus de poids ? Je travaille en transversalité sur ces questions avec Matthieu Orphelin, un proche de Nicolas Hulot. L’augmentation des prix pour générer des recettes pour l’Etat n’est plus possible, à terme ! Il y a des outils qui permettraient des avancées, comme la transformation du CICE (Crédit d’impôt compétitivité emploi) en baisse des cotisations sociales, sans contrepartie, mais nous ne sommes pas majoritaires pour porter ces questions. Les crédits à la rénovation énergétique de l’habitat vont être divisés par deux, alors qu’il faut lutter contre ces passoires énergétiques?! Aujourd’hui la pensée est urbaine et cela imprègne les décisions. Je suis sidéré que les ruralités soient considérées comme un espace de ressourcement, mais pas de vie, de production.
Autre préoccupation du moment, la sécheresse que subissent les agriculteurs, notamment dans l’Allier. Que faites vous pour relayer ces inquiétudes à Paris ?