Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
pcf71-ducharolais.com

LA GALERE DES ETUDIANT(E)S !

Pour la rentrée 2019, les loyers des chambres dans les Crous, ici au campus de l’université Paul-Sabatier à Toulouse,
ont augmenté de 1,6	% par rapport à 2018. Lydie Lecarpentier/Réa

Loyers qui flambent, coûts du transport et de la restauration qui grimpent, surcoût féminin… la présidente de l'Unef alerte sur les conséquences de la précarisation croissante des élèves qui suivent des études supérieures. Entretien avec Mélanie Luce, Présidente de l’Unef.

 

 

Une étude de l’Unef, parue vendredi, met en lumière une hausse du coût de la vie des étudiants deux fois supérieure à l’inflation, pour l’année à venir. La présidente du syndicat revient sur les causes de cette détérioration des conditions matérielles des étudiants, et avance des propositions.

Peut-on parler d’aggravation concernant les conditions de vie des étudiants ?

MÉLANIE LUCE Oui, l’augmentation du coût de la vie des étudiants pour l’année scolaire à venir est de 2,83 %, alors qu’elle était de 1,31 % pendant l’année 2018-2019. Cela résulte d’une hausse des dépenses contraintes, notamment celles du logement et du transport, avec, parallèlement, un gel des aides sociales. Les APL vont encore baisser, en 2020, pour les étudiants ­salariés. Les bourses, qui n’avaient connu aucune revalorisation depuis cinq ans, ont été symboliquement augmentées de 1 %. C’est très insuffisant. Il faut savoir que le premier poste de dépense des ­étudiants, c’est le logement, qui représente 69 % de leur budget mensuel ! Lors de la prochaine année scolaire, le loyer moyen passera de 458 euros par mois à 471 euros. L’augmentation la plus forte concerne Bordeaux, avec 11 %, et elle dépasse les 5 % à Paris. Concernant les transports, neuf villes universitaires connaissent des augmentations de tarif au-dessus de la moyenne ­nationale, qui est de 259 euros par an pour les boursiers et 270 euros pour les non-­boursiers. Enfin, dix villes ­cumulent hausse des loyers et des transports : Bordeaux, Rennes, Lille, Reims, Mulhouse, Saint-Étienne, Besançon, Nantes, Lyon et Nancy.

Comment expliquer cette flambée des loyers ?

MÉLANIE LUCE Dans des villes comme Paris ou Lille, les bailleurs ont pris leurs aises depuis la fin de l’encadrement des loyers, en 2017. Les prix des locations flambent. Ce phénomène est aggravé par le développement de plateformes comme Airbnb, qui provoquent une pénurie de logements de petite surface.

Qu’en est-il des dépenses d’alimen­tation ?

MÉLANIE LUCE Les restaurants universitaires augmentent leurs tarifs de 1,1 % en moyenne, mais les prix deviennent exorbitants dans les cafétérias des Crous, avec une hausse de 8,7 %. Beaucoup d’étudiants doivent déjà choisir entre se nourrir et se soigner ; ce sera encore davantage le cas.

Pour la première fois, vous relevez la différence femme/homme en ce qui concerne les dépenses des étudiants…

MÉLANIE LUCE à la suite d’une campagne que nous avons réalisée durant toute l’année dernière contre la « taxe rose » (des prix plus élevés pour des produits étiquetés « féminins » – NDLR), nous avons souhaité pointer le fait que les étudiantes sont dans une plus grande précarité encore que leurs camarades masculins. Parmi les dépenses exclusivement féminines, on trouve ­notamment 104 euros par an de protections périodiques, 19,20 euros de contraception et 52,12 euros de frais gynécologiques (médi­caments, consultation), ou encore 84 euros pour l’épilation et le rasage, contre 30 euros pour les garçons. Pour pallier cette inégalité, nous préconisons le remboursement total des dépenses liées à la gynécologie et à la contraception, via un chèque santé, et la distribution de protections périodiques gratuites dans les Crous.

Vous pointez également les hausses de frais de scolarité visant les étudiants étrangers non européens…

MÉLANIE LUCE Oui, on s’est battu pour que cette réforme, qui concerne des dizaines de milliers d’étudiants étrangers, ne passe pas. Grâce à notre mobilisation, 63 universités ont fait savoir qu’elles n’appliqueraient pas cette mesure gouvernementale. Mais ce n’est pas le cas de toutes : les frais d’inscription augmenteront en moyenne de 1 500 euros pour les étudiants étrangers non européens entamant une licence ou un master en France. Nous réclamons l’annulation pure et simple de cette mesure discriminatoire et un accompagnement social des étudiants étrangers.

Quelles sont les conséquences de cette précarité étudiante croissante ?

MÉLANIE LUCE On constate que de plus en plus d’étudiants sont obligés de travailler pour financer leurs études. Ils sont 46 % à le faire durant toute l’année universitaire. Cela les pénalise, car ils ont moins de temps pour réviser et se reposer. D’autant qu’ils sont victimes de l’ubérisation : certaines plateformes se spécialisent dans l’embauche d’étudiants. Beaucoup d’entre eux travaillent sous le statut d’autoentrepreneur, ce qui ne leur assure aucune protection sociale et ne constitue en aucun cas une réelle expérience professionnelle valorisable par la suite. Nous souhaiterions que le gouvernement se penche sérieusement sur cette question et mène des études pour évaluer l’impact du salariat contraint des étudiants, notamment en termes d’échec aux examens. Mais il préfère regarder ailleurs…

Quelles seraient les mesures à prendre ?

MÉLANIE LUCE Il faudrait un plan d’urgence de refonte des aides sociales pour répondre à la précarité, avec notamment une augmentation du budget des Crous, l’encadrement des loyers partout et l’application du demi-tarif pour les étudiants dans les transports en commun. Nous réclamons une revalorisation de 20 % des bourses, pour compenser leur gel depuis 2014. En 2017, lors du lancement de Parcoursup, ce dispositif devait faire partie d’un « plan étudiant » comprenant une réforme des bourses et la mise en place d’une « aide globale d’autonomie ». Cette promesse n’a jamais été tenue. Résultat : les étudiants sont en colère, ils se sentent méprisés, abandonnés par un exécutif qui ne prend pas en compte la réalité de leurs conditions de vie.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article