21 Décembre 2020
En un an, un million de Français ont basculé dans la pauvreté. L’impact de la crise touche les plus fragiles et se révèle impitoyable sur les jeunes. Sans droits ni revenus, ils payent le prix fort de l’explosion du chômage. Il est urgent d’ouvrir un revenu minimum pour les moins de 25 ans.
Le constat est unanime et saisissant : d’ici à la fin de l’année 2020, la France comptera près de 10 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Parmi ces « nouveaux pauvres », frappés par la pauvreté en raison de la crise économique et des conséquences de la pandémie, beaucoup de jeunes et d’étudiants.
« Depuis le début de la crise sanitaire, on fait des distributions de colis alimentaires chaque semaine dans les universités. Avant, c’était une par mois », confirme Kab Niang, le référent jeunes du Secours populaire de Seine-Saint-Denis. Le nombre d’étudiants bénéficiaires dans ce département est ainsi passé de 50 à plus de 200. Un chiffre effarant qui reflète l’impact de la crise sanitaire sur ces jeunes adultes. En plus de l’apprentissage à distance, qui s’avère parfois difficile, voire impossible sans les équipements nécessaires, s’ajoutent les difficultés économiques.
Ravages de la fracture numérique
« Quand je ne suis pas à l’université, je suis aux Restos du cœur. » Tel est le quotidien de Pierre (*), étudiant à l’université Paris-VIII. Il entame pour la seconde fois sa troisième année de licence géographie. « Je devrais être en master 1, mais j’ai dû redoubler à cause du premier confinement, déplore-t-il. Je n’avais pas d’ordinateur ni de quoi payer une connexion Internet pour suivre les cours. » Cette année, il a pris les devants et fait une demande auprès de son école. « En géographie, nous avons besoin de logiciels particuliers, qui ne fonctionnent pas sur l’ordinateur qui m’avait été prêté. » Depuis la réouverture des universités, Pierre fait chaque jour une demande de dérogation pour pouvoir se rendre dans la salle informatique du campus. Une solution qui fonctionne partiellement.
Julie (*) a fait face aux mêmes difficultés lors du premier confinement. Étudiante en dernière année de master en sciences politiques, elle n’avait pas d’équipement pour rédiger son mémoire. « J’ai pris du retard, mais ensuite le Secours populaire m’a prêté un ordinateur. Ça m’a sauvée. »
Aide alimentaire
Pour se nourrir aussi, les étudiants doivent redoubler d’efforts. Pierre, lui, va aux Restos du cœur. « Ils sont ouverts tous les jours, même le dimanche. Grâce à eux, je peux manger, souligne-t-il. J’ai récemment découvert que le Secours populaire vient faire des distributions de colis alimentaires directement sur le campus. Mais dans mon foyer on ne peut pas préparer de repas, pour des questions de sécurité. Donc je ne prends que les fruits, et je laisse le reste aux autres. »
Quant à Julie, elle se rend aux distributions du Secours populaire depuis le mois de mars. « J’habite en résidence universitaire. Dès le début du premier confinement, nous avons reçu un mail qui nous informait des distributions de colis alimentaires sur le campus de Paris-XIII. Ça m’a beaucoup aidée. » Elle a également bénéficié d’une aide pour payer son loyer : « Sans ça, je n’y serais pas arrivée », avoue-t-elle.
Les deux étudiants n’ont plus de revenus depuis le début de la crise sanitaire. Pierre travaillait comme livreur, Julie, elle, était employée polyvalente chez Pizza Hut. Pour l’étudiant en géographie, les difficultés s’accumulent. La perte de cet emploi l’empêche également de recharger son passe Navigo. « Pour aller étudier, je dois prendre les transports, je n’ai pas le choix. Alors là, j’ai deux procès-verbaux de 100 euros chacun parce que je me suis fait attraper par les contrôleurs. Mais je ne peux pas les payer. » Il conclut, dépité : « Avant la crise sanitaire, on pouvait avoir une vie honorable. »