6 Septembre 2021
Le président de la République Emmanuel Macron a annoncé jeudi 2 septembre vouloir expérimenter à Marseille, dans 50 écoles-laboratoire, et ce dès la rentrée 2022, la liberté du choix des enseignants par les directeurs. Dans ces écoles, a-t-il ajouté, il faudra "pouvoir d'abord choisir les enseignants, pour être sûr qu'ils sont pleinement motivés, qu'ils adhèrent au projet", a-t-il insisté, insultant ainsi les enseignants qu'il prend pour des buses et en reconnaissant, lui-même, dire "plein de gros mots pour beaucoup de gens". Merci Monsieur le président.
"Inventer ici l'école du futur", conclue-t-il. En fait cette "école du futur" reprend le projet néo-libéral d'une école privatisée. Jamais le démantèlement de l’école publique n’aura été aussi brutal que sous le mandat présidentiel d’Emmanuel Macron. De la maternelle à l’université. En face, il faut bien le dire, la résistance est faible. Lire à ce propos l'excellent article de Anne Jourdain et Allan Popelard "Les enseignants entre combattivité, apathie et sirènes managériales" dans le Monde diplomatique de mai 2021.
Le statut de la fonction publique garantit l'égalité de traitement des agents. Permettre à un directeur d'école de choisir ses enseignants, reviendrait à basculer dans un fonctionnement libéral, où les critères politiques, idéologiques, subjectifs et le clientélisme pourront prendre leur place. Un tel changement amènerait à caporaliser les choses, en permettant aux autorités académiques de placer les bonnes personnes pour appliquer la politique du ministre. Nous marchons à grand pas vers un système à l'étasunienne : une école publique dégradée, sans moyens pour les classes populaires, des écoles privées bien loties pour les classes suffisamment friquées.
Dès sa campagne présidentielle, en 2017, Emmanuel Macron a déjà milité pour "redonner de l'autonomie aux établissements en permettant de recruter sur la base de projets pédagogiques". Son très conservateur, néolibéral et zélé ministre de l'EN, Jean-Michel Blanquer, a ensuite vanté le "concept central de liberté" et défendu "un rôle à jouer en matière de recrutement" pour les chefs d'établissement.
Syndicats et politiques de gauche ont fait entendre leur refus de cette étape destructrice de l'école de la République comme Alexis Corbière, député de la FI : "Je suis rigoureusement contre cette proposition, c'est un éclatement du statut national de la fonction publique."
"Beaucoup plus que la chasse aux Arabes ou aux homosexuels, la lutte des classes est notre identité. Il est grand temps d'y retourner pour nous retrouver." disait il y a peu Olivier Todd. Les travailleurs de l'Education nationale et de l'Université devraient y songer plus encore qu'ils ne le font.