8 Avril 2024
Tout comme le réchauffement climatique, les milliers de molécules concernées par l'appellation PFAS (contaminants perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés) font l'objet d'un consensus scientifique large.
D'origine uniquement humaine et industrielle, ces composants causent une augmentation des risques de cancer et ont un impact négatif sur la santé des nouveaux-nés. En outre, des recherches plus récentes les associent à une baisse de la fertilité et à des perturbations de la glande thyroïde, parmi d'autres pathologies.
Le scandale sanitaire des PFAS est comparable "à l'amiante, au chlordécone", énumère Émilie Rosso, journaliste à France 3 et finaliste du prix Albert-Londres pour son enquête au long cours sur les polluants éternels dans la région lyonnaise. "On parle de produits qui font partie de tous les usages du quotidien, on en produit énormément. Et parce qu'on en produit énormément, l'environnement est massivement contaminé."
L'origine des PFAS est en effet multiple : ils proviennent des sites industriels, mais aussi de terrains militaires, d'épandages agricoles et de centrales d'incinération, parmi de nombreuses autres sources possibles. Ils se retrouvent dans de nombreux composés chimiques. Ils sont dans nos téléphones, nos vêtements, nos emballages, et le teflon, ce revêtement antiadhésif utilisé pour les poêles, et passent dans notre eau potable et notre nourriture.
Une étude menée entre 2014 et 2016 par Santé publique France a ainsi montré que deux PFAS, baptisés PFOA et PFOS, ont été retrouvés chez 100% des 744 personnes de tous âges testées, y compris les enfants. Pour l'expérience, des militants anti-PFAS publient régulièrement leurs propres tests, qui affichent des taux importants de polluants pourtant interdits.
Du côté des industriels, on brandit la menace de la destruction des emplois si les fabricants sont obligés de ralentir leur pollution. Les mêmes emplois occupés d'ailleurs par les personnes les plus à risque de subir les effets nocifs des PFAS.
"Évidemment qu'on va continuer à fabriquer des poêles, d'ailleurs Tefal sait très bien en produire sans ces revêtements en teflon", affirme Charles Fournier. "Le chantage à l'emploi ne peut pas être une réponse acceptable. Il y a des industriels qui fabriquent des ustensiles de cuisine sans ces polluants éternels."
Seulement, l'attitude d'industriels pour lesquels ces composés chimiques sont extrêmement rentables a considérablement ralenti la prise de conscience sur un sujet déjà technique.
Jeudi 4 avril, un projet de loi était présenté à l’Assemblée nationale prévoyant l’interdiction de fabriquer, vendre, exporter et importer tout produit contenant des substances PFAS appelées polluants éternels (présents, entre autres, dans les textiles, les emballages alimentaires, les mousses anti-incendie, les gaz réfrigérants, les revêtements antiadhésifs, les cosmétiques, les dispositifs médicaux, les produits phytopharmaceutiques, etc.).
Face au lobbying industriel, le parlement n’a réussi qu’à adopter une proposition de loi visant à les réduire. La CGT rappelle que les premières alertes scientifiques sur leurs impacts négatifs sur la santé et l’environnement remontent aux années 1970.
Des études scientifiques montrent que les PFAS sont cancérogènes, agissent sur le système immunitaire et que certains sont des perturbateurs endocriniens avérés ou potentiels selon l’ANSE.
Comme pour l’amiante, le patronat nous prédit une catastrophe industrielle si les PFAS sont interdits.
La CGT dénonce le court-termisme des logiques financières qui empêche d’anticiper : faute d’investissement, de travail préventif, de recherche et de développement, le patronat met les salarié·es au pied du mur, en leur imposant soit la fermeture de l’usine, soit de continuer à polluer. Le capital et la finance opposent systématiquement le social et l’écologie, fuyant ainsi leurs responsabilités.
Pour la CGT, il faut chercher, dès à présent, des alternatives à ces polluants éternels PFAS ou les remplacer par des substances moins dangereuses, non nocives pour les personnes, la nature et la biodiversité, pour garantir les emplois, la santé des salarié·es et, plus largement, la santé publique.
Pour la CGT, « fin du monde et fin du mois » sont un même combat et la santé de toutes et tous doit primer sur les dividendes versés aux actionnaires. Le bannissement des PFAS ne doit pas avoir de conséquences sociales pour les travailleurs et travailleuses qui doivent être informé·es sur les enjeux industriels et sociaux liés à ces polluants éternels. Les Instances Représentatives du Personnel doivent être informées, consultées et jouer un rôle pour anticiper la transformation de l’appareil productif.
Pour la CGT, cette transformation doit respecter les travailleurs et travailleuses, la nature et prendre en compte les transitions des métiers et des qualifications. Les emplois ne seront menacés que si les grands groupes n’investissent pas pour trouver des alternatives. À l’opposé du chantage à l’emploi, la CGT porte le projet du Nouveau Statut du Travail adossé à une Sécurité Sociale Professionnelle qui sécurise l’emploi et les garanties collectives des salarié·es.