1 Novembre 2024
Unis avec le « socle commun » autour de Michel Barnier, les députés du Rassemblement national ont permis le rejet de l’abrogation de la réforme des retraites à 64 ans, proposée par voie d’amendement au budget de la sécurité sociale par les groupes de gauche.
Est-ce à cause de la photo de famille de cette nouvelle législature, prise avant les questions au gouvernement, ou bien de l’amendement des groupes de gauche visant à abroger la réforme des retraites ? Les députés étaient présents en nombre dans l’hémicycle, ce mardi 29 octobre, alors que les troupes du « socle commun » autour de Michel Barnier, enchaînant les défaites, désertaient les bancs de l’assemblée des derniers jours.
Ainsi, par 232 voix contre 182, les députés ont rejeté les amendements identiques du NFP visant à abroger la réforme des retraites à 64 ans, dans le cadre de l’examen du projet de loi de la Sécurité sociale (PLFSS).
L’éternel débat du système de retraites
« Cet amendement vise encore une fois à augmenter les cotisations et à mettre en place en place votre dinguerie fiscale », tance Thomas Manager (RN). En s’opposant, l’extrême droite est ainsi venue au secours de l’exécutif, bien embarrassé dans les débats pour justifier son refus de l’amendement des groupes du NFP.
« Vous voulez continuer sur un rythme qui n’est pas tenable. Au début des années 80, les retraites représentaient 7 points de PIB, contre 14 aujourd’hui », rétorque la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet. Dans la même veine, le rapporteur général LR du PLFSS, Yannick Neuder, assène : « Si cette abrogation est adoptée, les comptes seront dégradés de 3,4 milliards d’euros dès 2025. » « Vous les avez, notre amendement permet 4 milliards de recettes supplémentaires », répond Manuel Bompard, de la France insoumise.
L’amendement commun des groupes du NFP comportait en effet « une nouvelle ressource basée sur l’augmentation de la cotisation vieillesse des salaires supérieurs à deux fois le plafond de la sécurité sociale », soit au-delà de 4 949 euros mensuels après impôts, assure le communiste Yannick Monnet.
« C’est simple, avec la gauche, quand il y a un problème, vous taxez », s’emporte l’ex-ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. « Vous prétendiez que l’abrogation ne peut se faire faute de ressources, nous y répondons par cet amendement » glisse Stéphane Peu (PCF). Une manière, aussi, pour la gauche de contourner l’article 40 de la constitution, permettant à la présidente de l’Assemblée nationale de rendre irrecevables des amendements amenant de nouvelles dépenses.
La gauche propose une conférence de financement et de nouvelles recettes
Puis, l’outil législatif du NFP prévoyait la convocation dans les six mois d’une conférence entre organisations syndicales et patronales « chargée d’identifier des conditions de financement permettant d’assurer l’équilibre financier durable du système de retraites tout en garantissant un âge d’ouverture du droit à une pension de retraite à 62 ans. »
La gauche rejoint ainsi la proposition de l’intersyndicale, formulée dès le début de la mobilisation de 2023. « C’est une réforme par amendement sans étude d’impact », déplore le LR Thibault Bazin. Reconnaissant que « travailler deux ans de plus peut paraître anxiogène », chez les salariés, la ministre Astrid Panosyan-Bouvet n’estime cependant « ni nécessaire ni souhaitable » d’ajouter un cadre de discussions aux « insistances paritaires existantes », comme le Conseil d’orientation des retraites (Cor).
La séquence autour d’une abrogation de la réforme des retraites n’est cependant pas close. Le RN qui voulait piéger la gauche lors de sa niche parlementaire, ce jeudi 31 octobre, a vu sa proposition de loi (PPL) vidée de ses objectifs en commission.
Selon le Figaro, le président de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet devrait d’ailleurs déclarer irrecevables les amendements RN rétablissant le texte d’origine, au titre de l’article 40. Ainsi, en ne soutenant pas l’initiative du NFP dans le cadre du PLFSS, l’extrême droite permet de sauvegarder la réforme à 64 ans en l’état.
Enfin, jeudi 28 novembre, une PPL cosignée par les députés LFI et PCF doit être examinée dans le cadre de la niche des insoumis.