RSA ET HEURES D'ACTIVITE :

par Pcf du Charolais (71)

À partir du 1er janvier, les expérimentations du RSA conditionné à 15 à 20 heures d’activités doivent se généraliser à l’ensemble du pays. D’abord testées dans des territoires de 18, puis 47 départements, ces expérimentations révèlent des mises en œuvre bien différentes d’une localité à l’autre. Pour les bénéficiaires, le plus grand flou persiste.

« Le compte à rebours commence en janvier », avertit Florent Lefebvre, représentant de la CFDT Emploi. En 2025, entre en vigueur la loi pour le plein emploi, adoptée le 18 décembre 2023, dont l’application avait été repoussée d’un an. Plus de 1,5 million de personnes « privées d’emploi » seront automatiquement inscrites à France Travail, qui entend coordonner l’ensemble des organismes d’insertion sociale. 200 000 jeunes suivis par les missions locales devraient ainsi basculer vers France Travail ainsi que les dizaines de milliers de personnes en situation de handicap accompagnées par Cap Emploi. Et surtout, les 1,3 million de bénéficiaires du Revenu de solidarité active (RSA), ainsi que leurs conjoints, l’allocation dépendant du revenu du couple (565 euros pour une personne seule, 848 euros si les deux conjoints sont au RSA).

Ce « compte à rebours » risque d’être celui d’une véritable bombe sociale à retardement. Pour les personnes sans emploi comme pour les agents de France Travail. « On bourre la machine à marche forcée jusqu’à ce que ça craque », estime Florent Lefebvre. À moins de quinze jours de l’échéance, les conseillers de France Travail se demandent bien comment ils vont pouvoir gérer cet afflux massif d’un nouveau public en insertion. Bénéficieront-ils de moyens supplémentaires pour les accompagner ? « C’est le flou artistique », résume le syndicaliste, également élu au Comité social et économique (CSE) de France Travail. Les agents savent simplement qu’ils devront faire avec moins d’effectifs : 500 emplois équivalents temps plein devaient être supprimés par le projet de finance 2025. France Travail prévoit « d’économiser » l’équivalent de près de 3000 postes d’ici 2027.

« On ne sait pas ce qui va nous tomber dessus », craint Agnès Aoudai. De son agence parisienne pourtant peu encline à la contestation, la conseillère entreprise, syndiquée à la FSU, « sent monter le ras-bol ». « Ça va exploser ! » lâche-t-elle. Le 5 décembre dernier, la plupart de ses collègues se sont mis en grève pour demander de meilleurs salaires et plus de moyens, contraignant le directeur à tenir l’accueil lui-même. Fait notable, le mouvement a été plutôt suivi.

« Les conseillers font moins d’accompagnements que de contrôles », déplore Agnès Aoudai. France Travail prévoit de tripler les contrôles annuels de recherche d’emploi : de 500 000 jusqu’à 1,5 million en 2027 ! Insultes, menaces, agressions, « chaque nouvelle réforme s’est manifestée par une hausse des conflits avec les usagers », constate Lakhdar Ramdani, de la CGT Pôle Emploi Bretagne. De l’avis de nos interlocuteurs, « France Travail est le réceptacle de la détresse sociale » subie par les agents de l’autre côté du guichet. Résultat : le mal-être se répand dans les agences, avec pour manifestation la hausse des arrêts maladie, des burn-out et le risque de décompensation psychique… En mars dernier, un manager d’une agence en Occitanie a mis fin à ses jours

Du côté des bénéficiaires du RSA, l’inquiétude grandit également. Au RSA depuis plus de dix ans, ValK (c’est un pseudo) appréhende aussi son basculement vers France Travail. À 54 ans, cette ancienne intermittente du spectacle a « les genoux HS ». Reconnue travailleuse handicapée en 2004, elle ne l’est plus malgré ses demandes. Elle attend donc de savoir quel pré-diagnostic, l’algorithme de France Travail établira à partir de ses données personnelles. En fonction des « freins sociaux » – difficultés de mobilité, d’accès au logement, à la garde d’enfants ou aux soins – identifiés par la plateforme, ValK sera orientée vers l’un des trois parcours : emploi, socio-professionnel ou social. Elle signera ensuite un « contrat d’engagement réciproque » qui déterminera son plan d’accompagnement personnalisé.

« Je vais devoir leur demander leur diplôme médical pour qu’ils jugent de mon état de santé », s’agace cette photographe amatrice. ValK appréhende surtout la mesure phare de la loi : devoir exercer au minimum 15 heures d’activité hebdomadaires, sous peine de voir tout ou partie de son RSA suspendu. Une mesure qui, à terme, pourrait s’étendre à l’ensemble des demandeurs d’emploi. « Si je bosse en présentiel je tue ma santé, même prendre le bus m’est compliqué. »

Ce RSA conditionné aux 15 heures d’activité a été expérimenté par dix-huit départements volontaires depuis le printemps 2023, puis par 29 départements supplémentaires en mars 2024. Les évaluations de la réforme sont très mitigées en matière de retour à l’emploi. Plusieurs territoires pilotes affichent ainsi, comme à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), un nombre d’allocataires en baisse. Sans qu’on ne sache à quoi correspondent ces sorties des statistiques, s’il s’agit de non-recours au RSA ou d’un retour à l’emploi.

 

Ce « compte à rebours » risque d’être celui d’une véritable bombe sociale à retardement. Pour les personnes sans emploi comme pour les agents de France Travail. « On bourre la machine à marche forcée jusqu’à ce que ça craque », estime Florent Lefebvre. À moins de quinze jours de l’échéance, les conseillers de France Travail se demandent bien comment ils vont pouvoir gérer cet afflux massif d’un nouveau public en insertion. Bénéficieront-ils de moyens supplémentaires pour les accompagner ? « C’est le flou artistique », résume le syndicaliste, également élu au Comité social et économique (CSE) de France Travail. Les agents savent simplement qu’ils devront faire avec moins d’effectifs : 500 emplois équivalents temps plein devaient être supprimés par le projet de finance 2025. France Travail prévoit « d’économiser » l’équivalent de près de 3000 postes d’ici 2027.

« On ne sait pas ce qui va nous tomber dessus », craint Agnès Aoudai. De son agence parisienne pourtant peu encline à la contestation, la conseillère entreprise, syndiquée à la FSU, « sent monter le ras-bol ». « Ça va exploser ! » lâche-t-elle. Le 5 décembre dernier, la plupart de ses collègues se sont mis en grève pour demander de meilleurs salaires et plus de moyens, contraignant le directeur à tenir l’accueil lui-même. Fait notable, le mouvement a été plutôt suivi.

« Les conseillers font moins d’accompagnements que de contrôles », déplore Agnès Aoudai. France Travail prévoit de tripler les contrôles annuels de recherche d’emploi : de 500 000 jusqu’à 1,5 million en 2027 ! Insultes, menaces, agressions, « chaque nouvelle réforme s’est manifestée par une hausse des conflits avec les usagers », constate Lakhdar Ramdani, de la CGT Pôle Emploi Bretagne. De l’avis de nos interlocuteurs, « France Travail est le réceptacle de la détresse sociale » subie par les agents de l’autre côté du guichet. Résultat : le mal-être se répand dans les agences, avec pour manifestation la hausse des arrêts maladie, des burn-out et le risque de décompensation psychique… En mars dernier, un manager d’une agence en Occitanie a mis fin à ses jours

Du côté des bénéficiaires du RSA, l’inquiétude grandit également. Au RSA depuis plus de dix ans, ValK (c’est un pseudo) appréhende aussi son basculement vers France Travail. À 54 ans, cette ancienne intermittente du spectacle a « les genoux HS ». Reconnue travailleuse handicapée en 2004, elle ne l’est plus malgré ses demandes. Elle attend donc de savoir quel pré-diagnostic, l’algorithme de France Travail établira à partir de ses données personnelles. En fonction des « freins sociaux » – difficultés de mobilité, d’accès au logement, à la garde d’enfants ou aux soins – identifiés par la plateforme, ValK sera orientée vers l’un des trois parcours : emploi, socio-professionnel ou social. Elle signera ensuite un « contrat d’engagement réciproque » qui déterminera son plan d’accompagnement personnalisé.

« Je vais devoir leur demander leur diplôme médical pour qu’ils jugent de mon état de santé », s’agace cette photographe amatrice. ValK appréhende surtout la mesure phare de la loi : devoir exercer au minimum 15 heures d’activité hebdomadaires, sous peine de voir tout ou partie de son RSA suspendu. Une mesure qui, à terme, pourrait s’étendre à l’ensemble des demandeurs d’emploi. « Si je bosse en présentiel je tue ma santé, même prendre le bus m’est compliqué. »

Ce RSA conditionné aux 15 heures d’activité a été expérimenté par dix-huit départements volontaires depuis le printemps 2023, puis par 29 départements supplémentaires en mars 2024. Les évaluations de la réforme sont très mitigées en matière de retour à l’emploi. Plusieurs territoires pilotes affichent ainsi, comme à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), un nombre d’allocataires en baisse. Sans qu’on ne sache à quoi correspondent ces sorties des statistiques, s’il s’agit de non-recours au RSA ou d’un retour à l’emploi.

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