OU SONT LES MAINS SALES !

par Pcf du Charolais (71)

On connaît tous cet adage de Ciceron, Dura lex, sed lex, La loi est dure, mais c’est la loi.

 

Ce latinisme s’applique bien à l’actualité. Marine Le Pen a été condamnée ce lundi à quatre ans de prison dont deux avec sursis (la partie ferme pouvant être aménageable sous bracelet électronique, elle n’ira sans doute pas en prison), à 100 000 euros d’amende et surtout à cinq ans d’inéligibilité avec une exécution provisoire c’est-à-dire immédiatement. 

 

Un certain nombre de cadres du RN ont également été sanctionnés. Cette décision fait suite à dix ans d’enquête, à deux mois de procès. On peut trouver la peine sévère mais justifiée. La présidente du tribunal Bénédicte de Perthuis a tenu à l’expliquer dans un rapport de 152 pages !

 

Ce qui a été jugé ici c’est un détournement de fonds publics : il s’élève à près de trois millions d’euros et le vol s’est déroulé sur une période de onze ans, de 2004 à 2016 : difficile d’y voir une fugace maladresse comptable. Au fil des ans les enveloppes attribuées chaque mois aux assistants grimpaient, grimpaient : de 17 000 euros à 21 000 en 2011, puis 24 000 en 2016. C’est Marine Le Pen qui était « au cœur du système » dit le tribunal, doublement coupable comme autrice et complice.

 

C’est elle donc qui a été le plus lourdement sanctionnée avec cependant un an de prison de moins que ce que réclamait le parquet et une amende trois fois moindre. Le système de défense utilisé par le RN (nous ? des voleurs ? des détournements ? première nouvelle, on n’est absolument pas au courant !) a été fatal à ce parti car le tribunal était en droit de se dire que s’il jouait le mensonge et l’impunité, c’est qu’il allait recommencer demain si on ne l’en empêchait pas.

 

Et puis il y a la question de la peine d’inéligibilité immédiate. Cette peine est introduite depuis 1992 ; la privation des droits civiques peut être prononcée pour une durée de dix ans maximum à l’encontre d’une personne exerçant une fonction du gouvernement ou un mandat électif au moment des faits. En ces temps où l’on regrette à juste titre l’image déplorable des « politiques », cette sanction s’est imposée au nom de la transparence, de la probité, de l’intégrité.

 

Alors ici cette sanction s’applique à une éventuelle candidate à la présidentielle ? et alors ? Le tribunal a précisé qu’il « ne méconnaissait pas les conséquences » mais qu’il ne faisait pas de politique en la circonstance : son souci était de rappeler ce b.a.-ba de la démocratie, l’égalité devant la loi. Le Pen a été traitée ici comme n’importe quel justifiable. Bref voici un jugement qui montre qu’en ce cas précis la démocratie (et la séparation des pouvoirs) a plutôt bien fonctionné.

 

Pourtant ce jugement a suscité d’étranges commentaires. La droite qui aime la jouer « légaliste » s’est laissée aller. « Le droit contre le peuple », titre Le Figaro. Le Premier ministre ose se dire « troublé ».

 

À gauche communistes, socialistes et écologistes prennent acte du jugement alors que du côté insoumis, on a eu droit à ce commentaire saugrenu de Manuel Bompard : « LFI n’a jamais eu comme moyen d’action d’utiliser un tribunal pour se débarrasser du RN. » Propos pour le moins hors sujet puisqu’il était question ici de détournements de fonds publics, propos bizarres a moins de croire des échos de presse qui estiment que les insoumis auraient eux aussi un dossier en cours avec la justice sur un sujet analogue.

 

Côté extrême droite enfin, ça crie, ça piaille, ça râle, ça se plaint d’une justice sévère. C’est presque drôle quand on sait que ces gens n’ont cessé de se plaindre du laxisme judiciaire, de revendiquer la plus grande sévérité de la Justice pour le plus petit délinquant. En somme au RN la « lex » doit être « dura », même très « dura », mais pour les autres, pas pour eux.

 

Gérard Streiff

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