LA TVA SOCIALE EST UNE ARNAQUE !

par Pcf du Charolais (71)

Financement de la protection sociale : attention à l'arnaque de la TVA Sociale !

 

 

Selon les libéraux, les dépenses de protection sociale doivent être réduites et son financement revu. C'est forcément un débat mal posé mais qui a l'avantage de la clarté sur les objectifs que les libéraux et le capital se fixent. Les retraités gagnent trop, il faut donc réduire leurs revenus, les chômeurs ne travaillent pas, il faut donc moins les indemniser, les citoyens sont trop malades, il faut donc réduire les remboursements, etc, etc. C'est ainsi que se prépare le budget 2026 avec un projet de réduction de 18 milliards des dépenses consacrées à la protection sociale. C'est une attaque d'une rare violence qui va aggraver de façon considérable les conditions de vie de nos concitoyens qu'ils soient retraités, jeunes, salariés ou privés d'emploi.

 

La question du financement de la protection sociale est donc au centre du débat public. Macron a dit vouloir ouvrir « dans les prochaines semaines » une conférence sociale sur le sujet, qui avait déjà fait surface lors du conclave sur les retraites. Au Sénat, une mission d’information pilotée par Raymonde Poncet-Monge (écologiste) et Elisabeth Doineau (UDI) planche sur la question. Tandis que le président du Haut Conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS), Dominique Libault, fait de même, à la demande du 1er ministre.

 

Le prétexte invoqué est le dérapage des comptes publics, avec un déficit à 5,8 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024 et une dette à 3 300 milliards d’€. A l’automne déjà, en plein débat budgétaire, la protection sociale était pointée du doigt. Puis, lorsque le gouvernement a évoqué un « effort de guerre » en début d’année, comme prétexte pour s'attaquer à notre modèle social.

 

La Cour des comptes alerte sur la dégradation des comptes des retraites dès 2025 (– 6,6 milliards d’euros) et pointe le rôle de la protection sociale dans la détérioration des déficits publics en 2024, du fait notamment de l’indexation des pensions de retraite sur l’inflation. Les prestations sociales contribuent pour 2,4 points à la croissance des dépenses des administrations publiques en 2024, soit pour plus de 60 %, relève l'Insee. Les comptes sociaux enregistrent en 2024 un déficit de 15,3 milliards d’€. Les libéraux avancent aussi les comparaisons européennes : à 34 points de PIB en 2022, contre 28 en moyenne dans l’UE, selon Eurostat.

 

A cela s’ajoute un défi démographique avec le vieillissement de la population et la baisse des naissances. Et des perspectives de croissance atones : le FMI prévoit une croissance de 0,6 % pour la France en 2025, après 1,1 % en 2024. Macron a été clair : pour réduire le déficit, il n’envisage qu’un seul levier, réduire les dépenses sociales. « On doit, d’ici à 2029, faire 70 euros d’économies sur 1 000 euros de dépenses publiques, a-t-il avancé. Le cœur de la bataille, c’est de garder une réforme des retraites ou d’avoir quelque chose qui, au moins, est aussi rentable que celle que l’on a votée, et de freiner la dynamique des autres dépenses sociales, c’est-à-dire le chômage et la santé. »

 

Ce diagnostic est totalement erroné. Le déficit public résulte avant tout des choix politiques faits depuis 2017 : la baisse des recettes et l’absence de reprise de l’activité économique. Entre 2018 et 2023, ce sont 62 milliards d’€ en moins, soit 2,2 points de PIB, qu’ont représentés les mesures fiscales adoptées. Et il y a des dépenses inconsidérées comme les 200 milliards de cadeaux aux grandes entreprises sans condition. Le scandale est tel, qu'une commission sénatoriale a été mise en place et commence à faire la lumière sur l'utilisation de ces fonds publics ! Ou encore les 43 milliards versés par l'Etat en 3 ans aux fameux cabinets conseils !

 

Ce n’est pas tout. Non seulement les recettes publiques ont diminué, mais, depuis 2018, ont été multiplié les dispositifs qui ont substitué au salaire de base des compléments de rémunération (comme la prime de partage de la valeur) exemptés de cotisations sociales. Cette substitution a généré un manque à gagner pour la Sécurité Sociale estimé à 18 milliards d’€ en 2022, soit 8 milliards d’€ de plus qu’en 2018 soit du même ordre que celle du déficit de la Sécurité Sociale hors Covid (+ 6,6 milliards d’euros).

 

Les comptes sociaux  ne sont donc pas dans le rouge. Le problème majeur est le découplage des dépenses et des recettes. Par exemple, la cinquième branche de la Sécurité Sociale : créée en 2021, la branche autonomie n’a vu aucun financement supplémentaire lui être affecté. Pire, il n'y a même pas de débat sur le sujet alors qu’à terme, c’est la branche qui va demander le plus de financement. Des besoins sociaux qui augmentent et génèrent des dépense sociales en progression, d’un côté. Un déficit public conséquent, de l’autre. « On se retrouve au pied de la pente et sans élan », synthétise Michaël Zemmour.

 

Par quel bout prendre le problème ? Repartir des besoins sociaux

 

Les besoins sociaux vont augmenter, en particulier dans 3 domaines : les retraites, la santé et la dépendance. La population vieillit. Les maladies chroniques se développent. Cela va accroître les dépenses et réduire les recettes issues des cotisations sociales car les retraités cotisent moins que les actifs. Dans une note de France stratégie datant de 2022, Pierre-Yves Cusset calcule qu’il va falloir trouver entre 0,6 et 1,4 point de PIB à l’horizon 2040 pour faire face au vieillissement de la population. 

 

Par ailleurs, l’innovation médicale entraîne aussi plus de dépenses. « En général, le progrès technique fait baisser les coûts. Mais pas dans la santé », explique Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE. On arrive à soigner des maladies qu’on ne soignait pas jusque-là. « La santé va nous coûter de plus en plus cher, il faut l’admettre. On peut faire des économies, mais ça augmente plus vite que le PIB dans tous les pays. Il est absurde de vouloir stabiliser cette dépense à 10 points de PIB ». Il considère qu’il faut « poser la question des besoins branche par branche, et non pas au global », et trouver ensuite le financement. Consacrer aux retraites 14 points de PIB (376 milliards d’euros) permet d’avoir un taux de pauvreté des seniors de 8 %, contre 12 à 16 % dans d’autres pays européens. C’est un arbitrage qui doit faire l’objet d’une discussion dans un cadre démocratique.

 

Trois leviers d’action possibles

 

Les leviers d’action sont de trois ordres : baisser les dépenses, augmenter les recettes et favoriser la croissance. Ces mesures n’ont pas le même effet. 

 

Côté dépenses, d’abord. Les mesures strictement budgétaires ont pour effet de réduire les dépenses sociales. Par exemple augmenter le ticket modérateur (la part prise en charge par les complémentaires) dans le remboursement des consultations médicales, une réforme qui a failli être adoptée à l’automne. Ou baisser les indemnités journalières en cas d’arrêt de travail, plafonnées depuis le 1er avril dernier à 1,4 Smic au lieu de 1,8. Toutes ces mesures ne font pas disparaître les problèmes, mais visent à transférer vers les assurés sociaux, directement ou indirectement via les complémentaires, le coût de la prise en charge. Cette privatisation de la dépense sociale « ne coûte pas moins cher. C’est une stratégie d’appauvrissement qui compromet l’avenir », selon M. Zemmour. C'est aussi le fondement même de la Sécurité Sociale qui est gravement attaqué !

 

Il y a des marges de manœuvre du côté des dépenses : la revalorisation des consultations médicales en 2024 pour un coût d’un milliard d’€ dégrade les comptes pour un effet qui risque d’être contre-productif, car désincitatif au travail pour une profession dont le niveau de revenus est déjà élevé. Les dépenses peuvent aussi être diminuées par des politiques plus structurelles : l’amélioration des conditions de travail pour limiter les arrêts maladie, la prévention pour réduire les maladies chroniques. Mais il s’agit de réformes ambitieuses aux effets incertains et dans le temps long.

 

Côté recettes ensuite. La TVA sociale fait son retour dans le débat depuis l’intervention de Macron. Il justifie cette mesure néolibérale au prétexte que la cotisation sociale pèserait sur le travail. Il veut réduire les cotisations sociales, augmenter les taux de TVA et financer ainsi la protection sociale. C'est un mensonge d'affirmer une telle chose. La cotisation sociale pèse sur le produit du travail. Plus précisément sur la partie profit obtenu avec le travail. Et elle permet de développer toutes les personnes, dont les travailleurs.ses… au-delà de leur seul travail.

 

Son mode de calcul prend en compte d'une part le salaire pour répondre au fondement solidaire de la Sécurité Sociale "Chacun paie selon ses moyens, et reçoit selon ses besoins" et d'autre part le nombre d'emplois, afin que chacune et chacun participent. 

 

La question politique centrale est donc le niveau du salaire et le nombre d'emplois créés, avec derrière l’enjeu des capacités humaines, qui dépassent largement celles du travail, et renvoient au développement de la personne humaine. Tout un projet de société du 21è siècle, au rebours du « travaille, travaille, travaille et tais-toi ».

 

La TVA sociale ne convient donc pas. C'est une arnaque ! Elle détruit les principes fondamentaux de la Sécurité Sociale et plus largement de la protection sociale. De plus, il s’agit d’un impôt injuste, qui pèse en proportion davantage sur les classes populaires. Enfin, comme elle porte aussi sur les produits importés, cela « revient à une dévaluation de l’euro-franc », explique Eric Heyer. « Elle consiste donc à faire financer notre modèle social par nos voisins européens. Or, notre modèle social résulte de choix que nous faisons. C’est à nous de le financer. ».

 

Certains poussent le débat sur un financement par l’impôt (CSG), ou assurantiel, plutôt que les cotisations sociales. « On dépense beaucoup d’énergie pour trouver le mode de financement magique, alors qu’il faut avoir une discussion sur le niveau souhaité de protection sociale », juge Michaël Zemmour. A l’OFCE, Eric Heyer défend un financement. par la fiscalisationIl avance l'idée que la maladie, la famille, la pauvreté et l'exclusion sociale, ou encore le logement, doivent être financées par l’impôtcar selon lui "il s’agit de risques universels : ce n’est pas parce qu’on travaille qu’on y a droit" Il plaide pour la création d’un impôt spécifique dédié à la santé, une sorte de CSG santé « dont le taux devrait être revu chaque année », en raison de l’augmentation des dépensesIl rejoint ainsi Macron et avance des idées qui épargnent le capital et les profits. Tout comme la fiscalisation ces mesures ne sont donc pas recevables !

 

Reste la croissance. Les quatre moteurs sont l'augmentation de la cotisation sociale payée par les entreprises qui met à contribution leurs profits, l'augmentation des salaires, la création d'emplois en nombre et la taxation des profits financiers des entreprises. Il faut prendre garde aux fausses solutions qui visent à augmenter la productivité en travaillant plus longtemps et en intensifiant le travail. Tout comme "le tout pour l'investissement" mais vu comme moyen de réduire les emplois. C'est à dire qui vise à augmenter le travail mort et à baisser le travail vivant. Ce qui aggrave la crise de productivité actuelle, réduit les ressources pour la protection sociale et réduit les capacités humaines de toutes et tous.

 

En agissant pour une croissance forte par les salaires, l'emploi et la formation, le PIB progresse et c'est ainsi que la dette est "avalée", c'est à dire que son taux en fonction du PIB est réduit ! Par contre, si le choix d'une croissance atone est fait par la politique d'austérité que cherchent à imposer Macron et Bayrou, alors la question de l’arbitrage entre les différents postes de dépense peut se poser. Il est souhaitable que les différentes projections soient faites (croissance forte - faible voire nulle). Mais cela reste un tabou au sein de l'Etat comme le remarque Mathilde Viennot. Difficile, en l’absence de scénarios précis, d’avoir une discussion digne de ce nom.

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