2 Avril 2018
En contestant le principe de 18 préavis de deux jours sur trois mois, les responsables de l’entreprise entendent retenir des jours de repos aux grévistes.
«Sabotage » contre « basses manœuvres », à la veille du coup d’envoi de la grève des cheminots, le ton monte entre organisations syndicales et direction de la SNCF. Alors que l’action des cheminots contre la réforme ferroviaire promet de mobiliser très largement les salariés du rail, la direction du groupe public ferroviaire « tente d’entraver l’expression des cheminots par la grève », dénonce la CGT, première organisation syndicale de la SNCF. En cause, entre autres, la multiplication des communications internes émanant de la direction à destination des salariés et dont le contenu, pour un agent qui hésiterait à se lancer dans l’action, peut paraître dissuasif. L’une de ces communications cristallise aujourd’hui la colère des syndicats.
Elle concerne les préavis de grève et les retenues de salaire et de jours de repos qui en découlent. En optant pour le principe d’une grève reconductible de deux jours tous les cinq jours, les syndicats de cheminots – à l’exception de SUD rail, dont l’appel à la grève est continu – ont fait le choix de « déposer un préavis de grève pour chaque période de quarante-huit heures, avec, à chaque fois, un motif différent parce que la loi nous l’impose », explique Laurent Brun, secrétaire général de la CGT cheminots. Or, et c’est là la pierre d’achoppement, la direction estime que les trois mois d’action constituent « un seul et même mouvement de grève ». Ce faisant, elle « met en avant des modalités de décompte des journées de grève clairement illégales », dénonce la CGT. En clair, « l’entreprise adapte la réglementation pour que la grève coûte le plus cher possible aux cheminots », poursuit Laurent Brun. Une réglementation qui stipule que, à partir de trois jours de grève, l’agent perd un jour de repos. En refusant de reconnaître le dépôt de 18 préavis de deux jours sur les trois mois de mobilisation, la direction de la SNCF « a décidé de manipuler les règles de rémunération et veut durcir, jusqu’à l’illégalité, le droit de grève », estime pour sa part SUD rail (troisième syndicat de l’entreprise). Mais, pour la CGT, « aucun doute ne subsiste sur la légalité (des) modalités » de la grève. Le syndicat en veut pour preuve un arrêt de la Cour de cassation du 30 janvier 2008 qui établit qu’« aucune disposition légale n’interdit l’envoi de préavis de grève successifs mentionnant des motifs différents » et voit, dans l’attitude de la direction, la preuve de sa « fébrilité (…) face à la détermination des cheminots et de leurs organisations syndicales ».
Les formations de gauche signataires de l’appel pour la défense des services publics, publié en amont de la mobilisation du 22 mars, préparent des initiatives pour soutenir le mouvement de grève des cheminots, qui débutera mardi. Dès vendredi, Isabelle de Almeida (PCF), Olivier Besancenot (NPA), Benoît Hamon (Génération.s), notamment, doivent se retrouver dans la matinée pour une initiative commune à la gare de Lyon, à Paris. L’ex-porte-parole du NPA et le fondateur de Génération.s devraient se rendre jeudi prochain avec Pierre Laurent (PCF), Sébastien Jumel (député communiste) ou François Ruffin (député insoumis), à Woincourt (Somme) et au Tréport (Seine-Maritime), afin de mettre en lumière les dangers que fait peser la réforme du gouvernement sur les « petites » lignes et soutenir les cheminots.