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METALLURGIE : FIN DU CDI ?

Le contrat de chantier est un CDI précaire à durée limitée	: il se termine une fois le chantier achevé. Jean-Claude Moschetti/REA
Le contrat de chantier est un CDI précaire à durée limitée : il se termine une fois le chantier achevé. Jean-Claude Moschetti/REA
CODE DU TRAVAIL. DANS LA MÉTALLURGIE, UNE GÉNÉRALISATION DU CDI DE CHANTIER
Mardi, 24 Juillet, 2018

Suite aux ordonnances Macron, les entreprises du secteur pourront désormais recourir aux CDI de chantier. Un contrat à durée déterminée ultraprécaire, dénonce la CGT, alors que l’intérim sévit déjà largement dans ce secteur.

Le contrat de chantier bientôt généralisé ? Utilisé surtout dans le secteur de la construction, il pourra désormais être proposé aux salariés de la métallurgie. Un accord de branche a été signé le 29 juin entre le patronat UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie) et la CFDT, la CFE-CGC et FO, sauf la CGT (premier syndicat de la branche). Signe que « le gouvernement nous a menti » et qu’il veut « généraliser ces contrats », a alerté le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, dans un entretien à la Marseillaise paru vendredi. Si la branche de la métallurgie « se lâche, c’est parce que les ordonnances le lui permettent », a-t-il poursuivi. Présent dans la réforme du Code du travail version Macron, le contrat de chantier est un CDI précaire à durée limitée : il se termine une fois le chantier achevé. Le contrat est alors rompu et le salarié touche des indemnités de licenciement régies par la convention collective.

UN VÉRITABLE « GRAAL POUR LE PATRONAT » SELON LA CGT

Dans cet accord de branche, conclu pour une durée de trois ans, les contrats de chantier ne dépasseront pas 10 % des effectifs dans les entreprises de 50 et 1 000 salariés et 5 % dans celles de plus de 1 000 employés. La durée minimale de ce contrat « ne peut être inférieure à six mois ». En cas de licenciement, une indemnisation spéciale sera versée, dont la somme dépendra de la durée du contrat : 8 % de la rémunération brute la première année, 6 % au titre de la deuxième année et 4 % au-delà. Soit un taux bien inférieur aux 10 % du salaire total brut de prime de précarité pour un contrat intérimaire. Un véritable « Graal pour le patronat », a estimé le secrétaire général CGT métallurgie, Frédéric Sanchez.

Dans la métallurgie, le niveau d’intérim est gigantesque : selon la CFDT, 100 000 intérimaires seraient en poste sur l’ensemble de la branche. Dans le seul secteur de l’automobile, on retrouve plus de 10 000 emplois précaires chez PSA, avec un taux d’intérim de 45 %, note la CFTC. La situation est encore plus importante chez Renault. Par exemple, à l’usine automobile de Flins (Yvelines), le taux d’intérim atteint 84 % sur les chaînes de montage, selon Fabien Gâche, délégué syndical central CGT. « Seul l’encadrement est permanent ! On n’a jamais vu ça ! », a-t-il expliqué dans les colonnes de l’Usine nouvelle. Sur l’ensemble du site, ajoute le syndicaliste, 2 000 intérimaires sont présents contre 1 000 embauches en CDI chez les ouvriers. Dans les usines de mécanique de Renault, le taux d’intérim, plus bas que dans celles d’assemblage, va jusqu’à 60 %. « La réponse de la métallurgie a été de se saisir de ce que lui offre le gouvernement pour généraliser les contrats de chantier afin de cacher cette précarité, relève Philippe Martinez dans la Marseillaise. Ce qui montre bien que ces ordonnances sont d’abord faites pour le patronat, qui sait les saisir pour remodeler les droits collectifs dans les branches. » Aux CDI de chantier, s’ajoute un autre accord signé par les organisations syndicales, permettant de réduire le délai de carence entre deux CDD ou contrats intérimaires successifs sur le même poste de travail à vingt et un jours (trois semaines), contre six mois dans le Code du travail.

BONUS-MALUS POUR LIMITER LE RECOURS AUX CONTRATS COURTS

À travers cet accord de branche, « c’est la question de la précarité qui est posée », résume Philippe Martinez, qui souhaite une taxation des contrats courts. Un amendement de la majorité, adopté in extremis dans le projet de loi Avenir professionnel, qui devait être examiné en deuxième lecture hier à l’Assemblée nationale, instaure le principe d’un bonus-malus pour limiter le recours aux contrats courts. Charge, maintenant, aux organisations syndicales et patronales de se mettre d’accord sur ce sujet dans le cadre des nouvelles négociations sur la convention assurance-chômage prévues cet automne. Le nouveau président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, s’est déclaré hostile à une telle mesure, la qualifiant « d’aberrante ». En cas d’échec des négociations, la balle sera dans le camp du gouvernement.

Les contrats à durée indéterminée de chantier s'appliquent désormais dans la métallurgie. Conclus pour la durée d'un projet, ils s'arrêtent à son terme. La CGT craint « la mort du CDI ».

Que prévoit l'accord dans la métallurgie ?

La mise en oeuvre de « CDI de chantier ». Ces contrats à durée indéterminée permettent de recruter des salariés, parfois pendant plusieurs années, pour un projet précis dont le terme est supposé inconnu : le lancement d'un

véhicule, d'une nouvelle gamme d'avions... Quand le chantier est terminé, l'employeur a le droit de licencier le salarié.

 

Les CDI de chantier sont pratiqués depuis les années 1970 dans le bâtiment. Les ordonnances Macron, adoptées fin 2017, autorisent l'ensemble des branches à en instaurer.

Qui a proposé cet accord ?

Le patronat de la métallurgie, qui salue « un rapport renouvelé au travail et à la mobilité ».Il a été signé par trois des quatre syndicats de la branche, la CFDT, FO et la CFE-CGC. Ensemble, ils sont majoritaires, si bien que l'accord est applicable aux 1,5 million de salariés du secteur.

Pourquoi des syndicats l'ont-ils signé ?

« La métallurgie emploie plus de 100 000 intérimaires. Nous espérons que les employeurs choisiront plutôt d'embaucher ces derniers en CDI de chantier », explique Stéphane Destugues, de la CFDT.

Ce contrat paraît plus avantageux que l'intérim. « Sa durée minimale est de six mois. Le salarié bénéficie de la convention collective de la métallurgie pour la rémunération. Et nous avons négocié des indemnités de licenciement très élevées. »

Qu'en dit la CGT ?

Le premier syndicat de la métallurgie a refusé de signer l'accord. « Le CDI de chantier élargit la panoplie des employeurs pour disposer de salariés jetables, fulmine Alain Hébert, de la CGT. Le patronat le destine notamment aux ingénieurs et cadres, jusqu'à présent relativement épargnés par la précarité.

Pour le cégétiste, cet accord ouvre une brèche : « L'ensemble des autres professions risquent de s'y engouffrer. Ce qui est visé, c'est la mort du CDI classique. »

Que répond la CFDT ?

Elle est consciente du risque. « Nous avons limité à 10 % le nombre de CDI de chantier dans les entreprises jusqu'à 1 000 salariés. Et à 5 % au-delà », souligne Stéphane Destugues.

Le cédétiste ajoute que l'accord, expérimental, s'éteindra dans trois ans. « Pour le prolonger, il faudra renégocier. Si ce n'est pas le nombre d'intérimaires qui baisse, mais celui des CDI, nous en tirerons les conséquences. »

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