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TRAVAILLER , C'EST GRATUIT !

Guerre sociale

«Territoires Zéro Chômeurs » : 
travaillez, c'est gratuit !

 

Soutenu par l'ensemble des parlementaires, droite-gauche confondus, le dispositif « Territoire Zéro Chômeur » dissimule un énième mécanisme visant à affaiblir et détruire la Sécurité Sociale tout en légalisant le travail gratuit.

 

 

« TZLCD », de quoi parle-t-on ? 

 

Mis en place depuis 2017, le dispositif « Territoire Zéro Chômeur Longue Durée » (TZCLD) concerne désormais cinquante territoires après l’adoption de la seconde phase de l'expérimentation par les députés le 30 novembre dernier. Soutenu par l'ensemble des parlementaires, droite-gauche confondus, ce dispositif dissimule pourtant un énième mécanisme visant à affaiblir et détruire la Sécurité Sociale tout en légalisant le travail gratuit.

 

Le principe de ce dispositif est simple : financer un emploi aux chômeurs de longue durée en redirigeant leurs allocations vers la rémunération d'une activité. En clair, le « bénéficiaire » de cette mesure travaille et se paye lui-même avec ses propres cotisations sociales…

 

Les personnes sans emploi stable depuis plus d'un an sur les territoires concernés par le dispositif sont ainsi recensées et invitées à se joindre à une « Entreprise À But d'Emploi » (EBE) créée pour l'occasion et dont les salariés sont censés choisir leur temps de travail, la nature de leur activité avec en prime un Contrat à Durée Indéterminé rémunéré au minimum à la hauteur du SMIC. Pourtant, et comme relevé par la CGT, dans la pratique, ce ne sont pas des CDI mais des CDD de 5 ans, souvent de temps partiel, qui imposent une « polyvalence » et qui ne respectent aucune convention collective.

 

Caution idéologique du projet, ATD Quart Monde assume vouloir « rediriger les coûts du chômage vers la création d'emploi » au travers du dispositif TZCLD. Par « coût », l’association caritative entend essentiellement les indemnisations chômage et autres allocations perçues par les travailleurs privés d'emploi (APL, RSA, AAH etc.).

 

Pourtant, comme l’a rappelé le Comité National CGT des Travailleurs Privés d'Emploi et Précaires (CNTPEP) dans une note revendicative, « La loi d’expérimentation TZLCD contourne la légalité : l’association d’une part d’aides de l’Etat et d’autre part des cotisations sociales revient à transformer du salaire indirect en salaire direct. C’est-à-dire transformer des droits inaliénables en un revenu conditionné par une obligation de travail. »

 

« Avec « Territoire zéro Chômeurs de longue durée », les « entreprises à but d’emploi », deviennent […] des lieux de non droits sociaux, avec une exploitation d’autant plus sournoise qu’elle repose sur le matraquage médiatique […] et sur une exploitation d’autant plus brutale qu’elle s’exerce sans convention collectives ni fiches de poste, ni contrat unique. » ajoute encore le CNTPEP CGT.

Un mécanisme individualiste, ultra-libéral et « caritatif » 

 

Le dispositif TZCLD repose donc sur le détournement de fonds de la Sécurité Sociale vers le financement d'une main d'œuvre gratuite dont la rémunération est issue des cotisations sociales des travailleurs en poste. Le patronat qui délocalise, licencie et multiplie les contrats précaires est ainsi entièrement déchargé de sa responsabilité du chômage de masse. Ce sont donc les travailleurs qui paient pour les dégâts causés par l'appétit insatiable de profits des grands monopoles capitalistes français.

 

À l'image du travail « bénévole » demandé aux allocataires du RSA au sein de plusieurs départements, le dispositif « Territoire Zéro Chômeur Longue Durée » entend mettre fin au chômage par l'extension du travail gratuit. « Spécifiquement, avec TZCLD s’installe l’idée cynique qu’il n’est pas possible de s’attaquer au fléau du chômage de masse, en particulier pour les chômeurs « de longue durée » sans que ceux-ci se paient eux-mêmes leurs propres salaires et qu’aucun coût ni contrepartie n’existe pour l’employeur », note d’ailleurs le CNTPEP CGT.

 

L'expérimentation reprend ainsi même le langage patronal en parlant de « coûts » du chômage comme les éditorialistes parlent de « coûts » du travail pour qualifier les cotisations sociales qui financent les indemnisations versées aux travailleurs privés d'emploi par la logique bourgeoise de maximisation du profit.

 

Genèse du projet et liens avec le patronat 

 

« Contre le chômage, on a tout essayé » prétendait François Mitterrand en 1993 lorsque le pays comptait 3 millions de travailleurs sans emploi. Moins de deux années plus tard, Patrick Valentin, ancien représentant l’UIMM Île de France (patronat de la métallurgie), lançait la première « Entreprise À But d'Emploi » du pays.

 

Cette première tentative sera toutefois étouffée, la loi ne permettant pas à cette époque la redirection des fonds du RMI vers le financement d'emplois. Ce n'est qu'en 2016, donc avec François Hollande et le Parti Socialiste de retour au pouvoir, que l'expérimentation est adoptée pour la première fois au Parlement, la loi organique de 2003 rendant désormais possible ce type d'expérimentation. Depuis 2017 et jusqu’à l’extension du dispositif, dix « Territoires Zéro Chômeur Longue Durée » avaient été créés et embauchaient près de 800 personnes.

 

 

 

Parmi les « pilotes » de ce dispositif, nous avons déjà mentionné Patrick Valentin ancien membre, responsable de la formation au sein d'une organisation patronale d'Ile de France. À lui s'ajoute Louis Gallois, président du fond d’expérimentation réservé aux TZCLD, également président du Conseil de surveillance de PSA et ancien président de la SNCF et responsable de la suppression de 20 000 emplois dans le secteur ferroviaire et de 18 000 emplois à PSA.

 

Enfin, Michel D. De Virville, co-Président du même fond et ancien DRH de Renault, responsable au sein du MEDEF et mis en examen dans "l'Affaire des Caisse Noires de l'UIMM" soupçonnée en 2007 d'avoir corrompu certains syndicats jaunes et financé des organisations d'extrême-droite comme l'UNI et le GUD. Beau CV pour chacun de nos trois mousquetaires de l'emploi !

 

La connivence des initiateurs et pilotes du dispositif, proche du Parti socialiste comme de la droite, avec le milieu patronal en dit long sur la conception du chômage et au regard porté sur les chômeurs, notamment les travailleurs sans emplois de plus de 50 ans…

 

Une arme de guerre contre la Fonction publique et la CGT 

 

 « 80% des travaux effectués [au sein des EBE] relèvent des compétences des agents territoriaux ou du tissu économique déjà présent localement. », a rappelé le CNTPEP, ajoutant : « [Ces dispositifs] forment donc directement une attaque contre les agents territoriaux de ces communes et accentuent la concurrence entre les salariés en représentant la manne de travailleurs 100% gratuit pour les employeurs ».

 

La preuve par l’exemple : au sommaire du cahier des charges des « Entreprises À But d'Emploi », nous retrouvons essentiellement de l'entretien d'espaces verts, du nettoyage de bâtiments publics, de la foresterie... Tous ces travaux sont généralement attribués à des agents de la fonction publique mais... un chômeur coûte moins cher !

 

Dans le Pays de Colombey-Les-Belles une étude pointe d’ailleurs la suppression du poste de régisseur par la communauté de commune après que les tâches qui incombaient à ce poste aient été relayées à l’EBE locale. À Nièvre à présent, l’Entreprise « Zéro Chômeur » a passé un marché avec la commune visant à détacher 10 de ses salariés afin qu’ils travaillent au service de la mairie selon un rapport de la DARES.

 

 

Remplacer des fonctionnaires par des contrats taillés pour l’occasion à des chômeurs de longue durée dénote avec les ambitions affichées par les porteurs de l'expérimentation nous présentant un projet d'économie sociale et solidaire sous lequel se cache dans les faits une nouvelle attaque contre la fonction publique et contre les chômeurs.

 

Ajoutons par ailleurs que le dispositif TZCLD est une véritable arme de guerre contre les syndicalistes CGT. Partout où la CGT défend les travailleurs « employés » dans le cadre de ce dispositif, les sons de cloches sont identiques : les employeurs refusent la présence de la CGT dans les comités locaux de pilotage, tentent de repousser les élections professionnelles, et lancent des procédures disciplinaires contre les syndiqués CGT.

 

L'extension des "Territoires Zéro Chômeur" est ainsi une très mauvaise nouvelle. Car, ne nous y trompons pas, ce qui aujourd’hui est « expérimenté » risque demain de devenir la norme si nous laissons faire sans réagir ni alerter les travailleurs, avec ou sans emploi.

 

Comme le rappelle d’ailleurs la CGT Chômeurs et précaires, ce dispositif est « un prolongement des attaques portées contre les travailleurs avec la loi El Khomri et les ordonnances Macron : attaque contre les fonctionnaires et leurs statuts, poursuite de la casse de la Sécurité sociale, casse du CDI et du droit du travail avec l’instauration d’un contrat unique, sans droits sociaux, tremplin vers encore plus de remise en cause du droit syndical et de développement du travail précaire ».

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