23 Juin 2023
Nous manquons de médecins, surtout de médecins généralistes, qui sont par ailleurs mal répartis sur le territoire. Dans ce contexte, la question de la régulation de leur installation est un serpent de mer qui agite le parlement depuis de nombreuses années. Ces derniers jours un groupe dit transpartisan, c’est-à-dire associant des députés de droite et de gauche, a proposé de conditionner l’installation des médecins à une autorisation dans les zones dites « bien pourvues » en soignants.
Finalement le gouvernement a repoussé cette mesure par la voix du ministre de la Santé qui s’est comporté comme relais du lobby des défenseurs de la médecine libérale qui refusent toute contrainte dans ce domaine. Son attitude est critiquable car son rôle est d’assurer un service de santé répondant aux besoins de la population et non d’être le porte-parole de sa corporation défendant ses intérêts particuliers.
Mais la principale question est de savoir si cette proposition était susceptible d’améliorer la situation et de permettre que tout assuré social puisse avoir une réponse adaptée à ses besoins. Sûrement pas, car depuis des années le constat qui s’impose est que la médecine libérale qui repose sur les principes de la liberté d’installation et de la rémunération à l’acte s’avère incapable justement de répondre à cet objectif.
En effet, une régulation efficace de l’installation des médecins doit s’appuyer sur une modification du mode d’exercice et de rémunération des médecins. Il faut changer de modèle et assurer une évolution rapide vers un exercice collectif dans des centres de santé pluriprofessionnels où les médecins, mais aussi les autres professionnels, sont salariés.
Cette organisation est la seule qui permet que la Sécurité sociale avec les Agences régionales de santé décide des lieux d’implantation adaptés des structures, avec un financement global basé sur les besoins de la population du territoire. Il ne s’agit plus alors de demander à des travailleurs indépendants que sont les médecins libéraux de s’installer dans des zones désignées mais de leur offrir des postes de travail là où sont les besoins.
Le salariat des médecins permet d’éliminer les dépassements d’honoraires et est aujourd’hui très attractif pour les jeunes, mais aussi de moins jeunes, médecins qui sont ainsi dégagés des tâches de gestion et d’organisation de leur outil de travail. Cet élément est essentiel car face au problème de démographie médicale, les marges de manœuvres disponibles sont que les médecins concentrent leur activité à la seule prise en charge de leurs patients, ce qui permet de dégager de 20 à 25 % de leur temps de travail.
Par ailleurs, l’exercice en binôme avec une infirmière et en collaboration avec d’autres professionnels de santé et du secteur social permet aussi aux médecins d’économiser du temps au profit d’un meilleur suivi de leurs patients. Attention à ce que les députés de la NUPES ne se trompent pas de chemin en essayant d’aménager le système libéral qui est en bout de course. Ils doivent au contraire se concentrer sur une politique de rupture autour du service public dans le cadre de l’aménagement du territoire.
Docteur Christophe Prudhomme
Praticien hospitalier- SAMU 93