14 Mai 2023
Macron a demandé, ce jeudi, « une pause réglementaire européenne » en matière de normes environnementale.
Cette prise de position intervient quelques jours avant un vote clef prévu le 26 mai au Parlement Européen et qui pourrait changer la donne quant au devoir de prévention et de réduction des pollutions à la source, Les Etats doivent clairement faire un choix faisant prévaloir ou celui de l’industrie-pollueur ou l’intérêt public (transition écologique et protection de la santé). Au travers cette prise de position de Macron, il semblerait que la France s'engage à soutenir les industriels. C'est en contradiction avec les engagements précédents.
Déjà, nombre de députés européens alertent face aux lobbys industriels comme les pétroliers et l’industrie chimique et de certains Etats qui répètent en boucle qu’il faut pas de surcharge administrative, laisser "notre’ industrie tranquille" et surtout pas de contraintes environnementales car trop coûteux.
Ces attaques à la réglementation font face à la prise de conscience que la nouvelle réglementation remplaçant la fameuse réglementation REACH pourrait changer la donne sur nombre d'aspects en France et au niveau européen :
Etablir un réel droit de compensation des citoyens en cas de pollution affectant la santé avec des sanctions minimales (chiffrés par rapport aux chiffre d’affaires)
Une obligation pour les autorités compétentes (tels que les DREAL en France ) de demander aux industriels de se conformer aux niveaux stricts des standards de performance environnementale (les Documents de référence MTDs en français), donc pas les niveaux les plus laxistes (juridiquement permis) mais les niveaux de pollution techniquement faisables. Il y a donc une opportunité de restreindre l’abus des dérogations de toutes sortes alors que des députés et Etats membres veulent rallonger cette liste de dérogations !
Obtenir une obligation de reporting (et du coup de mesures et surveillance) sur tous les PFAS en listant ces substances explicitement dans un règlement connexe. Cela forcerait également les autorités compétentes à revoir les permis et de fixer des valeurs limites d’émissions.
Concernant les PFAS, il faut avoir en tête que 5 pays réclament leur interdiction totale. La France n'est pas dans cette liste, mais à plusieurs reprises par l'intermédiaire des ministres, il a été affirmé qu'elle soutiendrait cette initiative qui est l'objet d'attaques de la part des groupes des industries chimiques.
La nouvelle sortie de Macron montre que la France serait en train d'évoluer de manière négative. L'on peut comprendre ainsi que cette prise de position de Macron ne passe pas alors qu'un nouvel avis émis par le Conseil d’Etat exige de la France qu’elle prenne rapidement de nouvelles mesures pour atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre.
Macron a estimé qu’il ne « fallait pas faire de nouveaux changements de règles », au risque de « perdre tous les acteurs », brandissant le « risque d’être les mieux disant en termes de réglementation et les moins-disants en termes de financement ». Pour justifier sa position, le chef de l’État a encore estimé que l’Europe fait déjà « mieux que les Américains, les Chinois ou toute autre puissance au monde ». Mais se comparer sciemment avec les derniers de la classe ne sert en rien la lutte contre le réchauffement climatique planétaire et contre les pollutions industrielles qui sévissent dans le pays notamment avec les perfluorés (PFAS) comme les territoires du Sud Lyonnais, de Rumilly ou de Tavant dans le Jura.
Devant les réactions, l’Élysée a du préciser qu’Emmanuel Macron ne demandait pas « de suspensions » mais était favorable « à l’exécution des décisions déjà prises avant de faire de nouveau changements », la petite phrase a déclenché l’ire des défenseurs de l’environnement, acteurs politiques et société civile.
« Les Français demandent une pause sur la mise en œuvre de la réforme des retraites, Macron leur propose une pause sur l’écologie », a vivement réagi Marine Tondelier d’EELV. Eurodéputée écologiste, Marie Toussaint a pour sa part fustigé « un contresens historique, une trahison écologique » qui « porte un dernier coup sur le cercueil du Green deal » (pacte vert composé d’un ensemble de mesures proposé par la Commission européenne pour atteindre la neutralité carbone du continent à horizon 2050).
Claire Nouvian, de l’ONG Bloom, dénonce des politiques « qui passent leur temps dans les COP et en conférence de presse à faire de belles déclarations et par-derrière, dézinguent l’environnement ».
Dans un contexte où « l’eau que nous buvons, la nourriture que nous mangeons, où les sols que nous foulons sont devenus toxiques ; que le climat se réchauffe, que la biodiversité se meurt, et que l’eau vient à manquer du fait de la course à la croissance que pourchasse Emmanuel Macron », égraine l’eurodéputée écologiste Marie Toussaint, « ce n’est pas de moins mais de plus de réglementations que l’Europe a besoin. »
Alors qu'il faudrait définir des seuils limites cohérents permettant de protéger la santé, il ne faudrait pas que ce débat pseudo - technique fasse oublier qu'il s’agit en toute priorité de définir les mesures concrètes visant à réduire les émissions, les rejets, les pollutions en s'attaquant à leurs sources et que l'on nous rabâche le mantra de l’industrie de "trop de réglementations" mais pas le bienfondé du pourquoi.
Encore une fois Macron a choisi son camp, celui du laxisme, du soutien au capital contre la santé, l'environnement et le réchauffement climatique.