Il y a eu un tremblement de terre terrible au Maroc, certes. Et les journalistes en font leurs choux gras. Normal. Non, je ne vais pas vous dire que les journalistes qui sont sur place, au lieu d’aider les gens se contentent de filmer comme dans l’histoire d’Armero. Je vais plutôt vous dire que cela fait une bonne excuse pour ne parler que de ça et oublier tout le reste : non seulement les conditions sociales en France qui se dégradent de jour en jour sont passées à l’as sous prétexte qu’il y a plus malheureux que nous ; mais, surtout, les conditions de vie habituelles des Marocains nous sont consciencieusement cachées.
Car, j’ai été au Maroc. Avec des amis et pas en voyage organisé. Et j’ai pu voir…
Dans le nord du Maroc, la moitié des villages sont remplis d’enfants qui ont le ventre gros. Comme les petits biafrais qui crevaient de faim qu’on nous montrait à la télé. Ils ont le ventre gros non parce qu’il est bien rempli, mais parce qu’il est vide. C’est un symptôme qui ne trompe pas. Mais, on ne les montre jamais à la télé. Peut-être parce que ce ne sont pas des Noirs mais des Blancs ?
À Marrakech, Je suis sorti des endroits touristiques. Il n’y a pas besoin d’aller bien loin pour cela. Il suffit en gros de quitter la grande place centrale où s’accumulent les touristes. Et j’ai vu…
Je me promenais avec ma copine, un sac de fruits à la main. Au bout d’un moment une maman a enfin osé me demander si je voulais bien donner un fruit pour son enfant. Je lui ai alors tendu le sac pour qu’il se serve. D’un seul coup, j’ai vu alors une nuée d’enfants qui venaient de partout en courant le plus vite possible vers le sac de fruits parce qu’il n’y en aurait pas pour tout le monde. Eux, ils n’avaient pas demandé la permission. Mais je ne me suis pas occupé de ça. J’ai lâché le sac de fruits qui s’est mis à tenir en l’air "tout seul" tellement les petites mains des enfants étaient pressées de se servir.
Ce sont des images qu’on n’oublie pas !
Mais, j’ai vu pire. Un soir, j’ai mangé pour "pas cher" dans un restaurant extérieur. juste des planches sur des tréteaux et des chaises. Sans mur et sans toit. Je mangeais quand une maman (avec sa petite fille) est venue me demander si elle pouvait en avoir un peu. Bien sûr, lui dis-je. Je commande alors un autre couscous. Elle s’installe juste à côté de moi pour le manger. Elle a tout mangé sans en donner le moins du monde à sa fille. Rien !
Mais, c’est pas tout. Le pire de cette histoire, c’est quand j’ai fini de manger. Je me suis alors rendu compte en me retournant qu’il y avait plusieurs gardes-du-corps qui me protégeaient d’une foule de gens, des dizaines et des dizaines, je n’exagère vraiment pas, qui voulaient aussi que je leur offre à manger.
Mais, les journalistes ne parlent jamais de ça à la télé. Pas assez vendeur ? Ou bien ne sont-ils pas au courant ? et ne se promènent-ils seulement qu’en touriste au milieu des coins typiques ?
Alors que j’étais assis en prenant le thé dans une rue marchande, j’ai vu comment se comportait un troupeau de touristes : Ils visitent, si l’on peut dire, en tachant surtout de ne pas perdre le groupe. Dès que l’un d’eux s’aperçoit qu’il est à plus de 3 mètres du groupe, il prend peur et rejoint au plus vite le troupeau. Ces gens là ne risquent pas de voir grand chose. Les journalistes sont-ils comme eux ? ou bien cachent-il volontairement la vérité du Maroc ?
Seul un événement un peu spécial comme un tremblement de terre les intéresse. Certes, il y a des milliers de victimes. Alors, ils organisent des quêtes : « À votre bon coeur monsieur dame » . Bonne conscience. Mais, combien y-a-t-il de victimes mortes de la faim au Maroc, et tous les jours, pas seulement pendant trois semaines ? Infiniment plus. Mais… silence.
Bien à vous,